Après enquête, la Cour européenne a reproché à la France de ne pas avoir pris de mesures pour prévenir, réduire et combattre la pollution massive de l'étang de Berre alors qu'elle en connaissait l'existence. Autrement dit la France n'a pas respecté les prescriptions de la Convention de Barcelone de 1976 sur la protection du milieu marin en Méditerranée.
En réponse à cette condamnation, la France a proposé à la Commission européenne une série de mesure qui a été jugée insuffisante pour permettre une amélioration nette et rapide de l'état écologique de l'étang. La France a notamment demandé à EDF de modifier le cahier des charges de sa concession pour l'exploitation des centrales de Salon-Saint-Chamas dans le but de réduire les rejets dans l'étang de Berre. Mais ces modifications nécessitent une enquête publique qui sera menée de janvier à février 2006 et ne rentreront en vigueur qu'en mai 2006 pour une expérimentation de quatre ans.
Certaines modifications ont toutefois déjà été réalisées. Depuis septembre 2005, les rejets d'eau douce sont désormais régulés à l'échelle hebdomadaire pour réduire les variations de salinité et un nouveau quota annuel d'apport de limon a été fixé à 60.000 tonnes.
En ce qui concerne la maîtrise des rejets d'autres substances toxiques et non toxiques, EDF a fait réaliser des prélèvements et des mesures. Il apparaît que les rejets d'eau douce ne comportent pas de teneurs décelables ou supérieures aux normes de qualité définies par la France.
Reste que cette solution est mise en oeuvre pour répondre à court terme à l'arrêt de la Cour de justice des communautés européennes, sans préjuger d'une future décision définitive de l'Etat. Les dix maires des communes du pourtour de l'étang de Berre, le Groupement d'Intérêt Public pour la Réhabilitation de l'Etang de Berre (GIPREB) et la coordination des pêcheurs estiment à l'instar de la commission européenne que ces mesures restent insuffisantes et que l'arrêt total des rejets d'eau douce et de limon est nécessaire au rétablissement de l'équilibre de l'Etang. Mais cette centrale représente 50% de la production d'électricité en PACA et 10% de la production hydraulique nationale. C'est pourquoi un projet est à l'étude, basé sur la déviation des rejets d'eau douce vers le Rhône qui passe à proximité de l'étang de Berre. Mais tout est encore à l'état de projet.
Vu son peu d'enthousiasme et conformément à la procédure, la France a reçu en décembre dernier une lettre de mise en demeure et a deux mois pour y répondre avant que d'autres procédures ne s'enclenchent et aboutissent à terme à des astreintes financières. Jean-Claude Bourgault, ancien président de la Coordination des pêcheurs de l'étang de Berre se dit content mais pas étonné : je m'attendais à cette décision de la Commission, qui est logique. La proposition de la France de lisser les rejets d'EDF a été faite pour noyer le poisson ! Le fonctionnement de l'usine de Saint-Chamas ne permet pas de réguler les rejets car c'est une centrale d'appoint.
Dans une autre procédure conduite devant la justice française, il affirme qu'EDF n'a pas les autorisations pour exploiter Saint-Chamas. Cette affaire a été renvoyée devant la Cour d'appel de Lyon en mars 2005 qui devrait se prononcer courant janvier.
Serge Andréoni, président du GIPREB et Maire de Berre, rappelle quant à lui que le lissage était une mesure transitoire et non pas une solution définitive et se dit favorable à un canal jusqu'au Rhône : nous pensons, contrairement à EDF, qu'une dérivation après Saint-Chamas est possible. Nous accepterions des impossibilités techniques mais pas des arguments financiers. Le coût du projet de dérivation est estimé à 1 milliard d'euro.